Une idée du bonheur #1
Un projet. Flou, loin, informe, bancal, mais débordant de tous les possibles, prometteur. Une page blanche excitante. Du concept à en vomir, des images qui reviennent en boucle, qui hantent, qui resurgissent à chaque nouveau passage du train le matin, à chaque nouveau sujet lancé dans la voiture sur France Inter, à chaque discussion à la machine à café, à chaque fois que ta mère te demande des nouvelles de tel ami perdu de vue. A n'importe quelle occasion.
Un projet que tu bouffes, inhales, cours, rêves, dessines, remanges, exhales. Un truc omniprésent qui donne lieu à ces milliers de mots griffonnés sur des bouts de papier arrachés partout, en panique, minutieusement épinglés et conservés dans ton sac, dans tes poches, dans tes brouillons de textos dans ton téléphone, sur tes mains.
Un projet comme ça, ouais. Qui prendrait autant de temps à penser qu'à réaliser. Qui maintiendrait éveillé les trois quarts du jour. Qui devient autre chose chaque semaine, plus gros, plus fou, plus sexy. Qui est évident à tes yeux. Qui fait sens. Qui t'est indispensable. Qui pourrait même te prendre toute ta vie, sauf que t'en as rien à foutre.
